Accompagner nos élèves vers la Sixième

dimanche 10 octobre 2004
par  Jean-Claude ROLLAND
popularité : 5%

a relation élève - enseignant se modifie au moment du passage du cycle des approfondissements (Cycle 3) au cycle de transition (6ème). La proximité de l’adulte évolue.
Comment connaître et accompagner ces ruptures nécessaires ?

Des cultures, des contenus et des fonctionnements différents

La proximité avec l’élève

La relation élève - enseignant se modifie au moment du passage du cycle des approfondissements (Cycle 3) au cycle de transition (6ème). La proximité de l’adulte évolue.
L’« instituteur » est connu, quelques fois depuis le cours préparatoire l’élève sait qu’il « sera avec Monsieur X au CM2 », d’ailleurs son grand frère, sa grande sœur a eu ce maître et les parents eux-mêmes le connaissent.
Les professeurs sont quant à eux, souvent des adultes dont on n’a jamais entendu parler, qu’on n’a jamais vus. La « réputation » des enseignants ne passe plus par le biais des adultes, parents ou directeur, mais par le bouche à oreille d’élève à élève. Les premières semaines au collège donnent le tournis quant à la multiplicité des adultes en relation avec l’élève : les professeurs des différentes disciplines, les professeurs documentalistes, les surveillants, les CPE, le principal, son adjoint, le gestionnaire, le secrétariat, les surveillants, les personnels divers et multiples travaillant au restaurant ...

Le vocabulaire lui-même change : on ne va plus voir Madame Y, la directrice mais on se rend à la Vie Scolaire ... Les parents n’ont plus de référent privilégié, il leur est impossible de retenir les noms des enseignants et des différents personnels.
Cependant, on tiendra compte pour modérer le propos de l’évolution actuelle du corps des professeurs d’école due en particulier
- aux départs à la retraite des babies boomers,
- au recrutement au niveau licence,
- à la formation initiale des instituteurs qui est passée de 3 années à l’Ecole Normale à une en IUFM
- à un contrat de moins en moins signé par vocation
Ils sont de plus en plus jeunes, moins connus et reconnus, gardent encore la représentation d’un enseignement disciplinaire, ont une crainte à prendre contact avec les parents d’élèves.
Paradoxalement ce maître unique aura des relations plus fréquentes avec l’élève que ne pourront en avoir l’ensemble de cette pléthore d’adultes du collège. Le maître d’école, par sa polyvalence, aura de l’élève une vision plus globale à travers les attitudes et les comportements que ce dernier adoptera dans les différentes situations de sa vie à l’école, alors que, par exemple, tel ou tel adulte, de par sa fonction dans l’établissement du secondaire n’en aura qu’un aperçu réduit. Le CPE ne verra tel ou tel élève que parce qu’il est régulièrement en retard ou souvent absent, ou encore parce qu’il est souvent exclu du cours d’arts plastiques.
Le simple fait d’une part d’enseigner les mathématiques, la géo, les sciences, ... et d’autre part de surveiller régulièrement la cour de récréation apporte à l’enseignant de l’école élémentaire une proximité certaine. Il lui est possible d’avoir par exemple soigné une écorchure au genou survenue pendant la récréation puis quelques minutes après, en classe, de lire avec l’élève en relation duelle ses productions de géographie ou de sciences sur son cahier.

Le guidage pédagogique


A l’école, l’accompagnement est unique ou en tout cas limité à très peu de personnel (le maître, le directeur, les membres du RASED). L’enfant, entré à 6 ans à l’école primaire est devenu un élève de CM2 mais cette dimension est encore pris en compte par l’enseignant : son parcours scolaire est connu, ses difficultés, sa famille, son mode de vie sont des données que le maître prend en compte. Sa pédagogie est plus proche, plus centré sur l’enfant.
Au collège, cet accompagnement est pluriel et moins serré, plus centré sur l’élève. Le rôle du professeur principal est ici essentiel : Voir Les missions du professeur principal sur le site de l’ONISEP d’Amiens. Dans son métier d’élève de collège, l’enfant devra décoder l’implicite de la pédagogie de chacun de ses professeurs.

Le contrat didactique


Voir sur ce site l’article le contrat didactique
Arrivé dans le secondaire, l’élève perd quelque peu ses références en ce qui concerne sa propre évaluation. "Etre bon en Math’s" change de sens, puisque anciennement c’était en référence à d’autres disciplines enseignées par le même adulte ; désormais la seule référence est disciplinaire : « être bon en Math’s » c’est faire partie des meilleurs élèves. Dans le secondaire, le contrat didactique implicite des disciplines, les écarts des exigences entre chaque professeur, les attentes différentes nécessiteront de dire à l’élève ce qui est travaillé, pendant combien de temps et surtout comment et pourquoi il sera évalué afin qu’il puisse se situer et se rendre compte de ses progrès. En effet, il est difficile pour un collégien d’y voir clair à travers tous ces systèmes de notations utilisés par ses enseignants. L’élève devra interpréter de multiples situations présentées, des informations plurielles qui lui seront fournies, des contraintes différentes qui lui seront imposées en fonction de ce que les professeurs de collège reproduisent, consciemment ou non, de façon répétitive dans leur pratique de leur enseignement. [1]

Les rythmes de travail, la place du travail personnel demandé à l’élève

Quels changements en ce qui concerne ces nouveaux collégiens ?
Une des priorités est en 6ème est la capacité à écrire rapidement. Nombre de professeurs exigeront de leurs élèves une prise de notes rapide. En effet, les séances d’enseignement du collège durent 55 minutes sans que les enseignants aient la possibilité de pouvoir reporter la mise au propre de la leçon sur une autre heure comme cela se fait régulièrement au CM2.
De même, alors qu’en CM2 nous pouvons faire durer une séance si les élèves accrochent sur une notion, en 6ème cela est impossible. Il y a bien au collège une accélération du temps et du rythme scolaire.
Le volume de « devoirs à la maison » (voir l’article « A propos des devoirs ») provoque une rupture certaine, on exige des élèves plus d’autonomie face au travail. L’organisation des travaux jusque là était gérée par les adultes que ce soit le maître ou les parents : ce travail est de plus en plus de nature écrite et l’exigence des professeurs est forte et logique.

L’écrit et l’oral.

A l’école, l’écrit est objectif d’apprentissage. Au collège, l’écrit est surtout support de connaissances. Les élèves copient de plus en plus, plus longtemps. Il est utilisé à la maison pour les devoirs et les recherches. L’écrit est systématiquement utilisé pour les contrôles.
En opposition, les échanges oraux augmentent : enseignement de la première langue vivante, forte demande de participation réglée et réfléchie des professeurs, ... Les leçons sont rythmées et souvent dialoguées. Les professeurs attendent des élèves cette participation active.

Ces changements sont souvent perçus par les élèves comme des ruptures avec leur vie d’écolier antérieure. Après quelques temps, les difficultés semblent s’aplanir : les élèves reconnaissent leurs professeurs, connaissent leurs exigences.
Les changements dus aux rythmes peuvent cependant être plus délicats à opérer. Lors de leur dernière année de cycle 3, le CM2, il apparaît nécessaire d’aborder les méthodes du collège, de développer les activités faisant appel à leurs responsabilités face leur propre travail et à leur autonomie. Il est tout à fait possible de donner du travail qui sera fait en classe en fixant des échéances à quelques jours voire une semaine. L’utilisation du cahier de textes ou de l’agenda doit être régulière et maîtrisée par les élèves.
En ce qui concerne la place prépondérante de l’écrit, les programmes de 2002 sont un atout. Ils préconisent l’usage de l’écrit dans les différentes disciplines. Les débats réglés dans l’ensemble des disciplines préparent les élèves à l’oralité nécessaire pour le collège.

Des ruptures sont nécessaires pour grandir :

L’année de la Sixième, c’est l’année du passage du connu à l’inconnu : un rite initiatique ? En tout cas grandir c’est savoir gérer l’inconnu. L’élève de 6ème va enfin prendre en charge ses déplacements du domicile au collège. Cette rupture sera souvent accompagnée d’une responsabilité familiale, il devient "enfant à la clef" puisque les horaires deviennent variables d’un jour à l’autre. Il va apprendre à organiser son temps libre, ses relations avec ses copains, ses devoirs, une nouvelle solitude.

Au collège il saura gérer une plus grande diversité d’adultes et s’adapter à des caractères, à des exigences différentes.

Pour réussir, il lui sera nécessaire construire soi-même des relations entre les savoirs dispensés : l’interdisciplinarité est bien souvent dans la seule tête des élèves, le cloisonnement disciplinaire est encore la règle au collège.

Ces ruptures doivent être accompagnées



Certaines seront assumées par l’enfant seul. Pour d’autres et afin que le passage soit positif, l’équipe éducative aidera à faire le saut, à réduire la distance.

Chaque acteur (instituteurs, professeurs de collège, directeurs, chefs d’établissements, coordonnateur de Réseau d’Education Prioritaire, inspection départementale, CIO, assistants sociaux, médecins, infirmiers, surveillant, ...) participeront à la réussite scolaire des élèves en prenant l’enfant dans sa globalité à travers ses difficultés, son affectivité et ses connaissances, en rapprochant les enseignements afin que l’élève tisse des liens entre les disciplines, en aidant les parents à aider leurs enfants, à ne pas être anxieux, à bien connaître les enjeux, en préparant l’avenir, en donnant les choix d’orientation ultérieurs.

Comment ? en se donnant des objectifs simples


- en organisant des visites des établissements afin de permettre aux élèves et aux parents de découvrir ce qu’est le collège avant que les enfants n’y entrent
- en rédigeant un livret d’accueil du collège
- en permettant aux classes de CM2 de visiter le collège, d’enquêter au collège, d’assister à des cours, d’utiliser le CDI
- en rencontrant les nouveaux parents à l’inscription de leurs enfants
- mettant en place un tutorat 4ème - CM2
- en faisant travailler ensemble 6ème et CM2 à travers des actions de REP : (rencontres sportives, projets divers, tests dans certaines disciplines)
- en étudiant dès le CM2 le système éducatif

Pour les enseignants, pour que cette continuité des apprentissages ne soit pas un vain mot :

- en adaptant l’enseignement de part et d’autre
- en utilisant quelques méthodes de travail du collège
- en développant les activités faisant appel à l’autonomie de l’élève (cahiers de textes, contractualisation, ...)
- en explicitant les nouvelles méthodes de travail en sixième
- en redonnant au collège un rôle et une place à l’oral dans d’autres occasions que la réponse à des questions

Pour favoriser les rencontres, les liaisons le coordonnateur de REP à un rôle central :
- en élaborant et réalisant des projets en commun avec les enseignants et les chefs d’établissement (défis, expositions, sorties)
- en travaillant ensemble à la meilleure connaissance des élèves au moyen des évaluations 6ème
- en assurant un suivi des élèves en difficulté, en passant le relais entre équipes éducatives des écoles et les équipes-relais du collège
- en participant à des stages « continuité des apprentissages » conjoints premier et second degré.


d’après Marc BABLET, IA-IPR, responsable des ZEP, directeur du CAREP de Paris - 26 janvier 2000 et le site de F. Muller


[1d’après Brousseau G., Fondements et méthodes de la didactique des mathématiques


Commentaires  Forum fermé

Logo de Jean-Claude ROLLAND
Accompagner nos élèves vers la Sixième
mercredi 13 janvier 2010 à 11h10 - par  Jean-Claude ROLLAND

La continuité entre l’école et le collège en ZEP, avec Marc Bablet, IA adjoint en Seine-Saint-Denis (Rencontre OZP du 09.12.09)

- Sur le site de l’Observatoire des Zones Prioritaires (OZP)
- le compte-rendu