Ecriture et slam en CM2 (1)

A rebours des clichés sur les élèves d’Epinay
mercredi 20 mai 2009
par  Philippe Rocher
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Les textes de la classe d’un CM2 d’Epinay qui ont permis aux élèves d’être les gagnants du concours national SNCF "Voyageur et citoyen"

Ces textes ont été écrits par les élèves de la classe de CM2 de Mme Guettouche, avec l’aide de Mme Carmarans. Ils leur ont permis d’être les gagnants du concours national SNCF "Voyageur et citoyen".

Sur plus de 250 écoles participantes, ce sont les 5 textes de cette classe de CM2 de l’école Jaurès 1 d’Epinay (en ZEP, quartier des Presles) qui ont été retenus .
La classe a ainsi gagné deux choses : rencontrer des poètes slammeurs et avoir la possibilité de travailler avec eux, mais aussi l’opportunité de participer au Slam Interscolaire de Bobigny le 19 juin 2009, l’un des trois moments du Grand Slam National et International de poésie. Pour être exact, la classe sera à la fois participante et spectatrice. Les quatre élèves retenus pour représenter la classe devront déclamer deux poèmes chacun et un poème en collectif.
Au train où ils vont (!) il n’est pas impossible que les élèves gagnent mais la compétition sera rude car Bobigny est champion du tournoi de slam pour la quatrième année consécutive. Les élèves assisteront également au tournoi de slam des collégiens.

Cauchemar

J’en ai marre, j’ai le cafard. Je marche dans le noir et je tombe sur les rails.
Au loin, je vois un train corail, aïe, aïe, aïe !
Je tente de me soulever pour me relever et me sauver.
Mais le train corail pour Paris roule à toute allure.
Mon futur est démoli, la vie n’est plus une aventure.
Réveil : 9 heures et quart, gare Haussmann St-Lazare.
Soleil : ouf, c’était un cauchemar !

Maintenant, je me détends et je suis présent.
Je suis adroit, j’évite les rails.
Au loin, je vois mon train corail.
Sur le quai, je respecte les consignes de sécurité.
Le train ralentit, c’est mon ami, bien sûr.
Mon futur est infini, ma vie est une ouverture.
Tout est bien qui finit bien pour l’enfant-citoyen

Le fraudeur

Tu te lèves le matin, de mauvaise humeur,
En cherchant le Pass Navigo de ta sœur.
Dans le train, tu t’affiches, le visage en sueur.
Tu te sens mal dans ton corps et dans ton cœur.
Parfois, tu menaces même les voyageurs.
Tu peux peut-être esquiver le contrôleur,
Mais tu n’échapperas pas à ta peur.
Tu t’enfuis dans la gare comme un vulgaire voleur.
Tu te fais piéger comme un amateur.
Tu ne peux plus bouger, tu te sens humilié.
Moralité : pour voyager en toute sérénité
Paye ton ticket, c’est le respect assuré.

De gare en gare

Va à la gare Saint-Lazare : prends un train au hasard et chasse tes idées noires
Sors ton mouchoir pour dire au revoir au désespoir.

Va à la gare de Lyon prends ton coupon pour passer les portillons
Sors du cocon et ne fais pas le con ; deviens un grand garçon.

Va à la gare du Nord, les gens sont toujours dehors et personne ne dort.
Tu sauras être fort et trouver de l’or sans effort.

Va à la gare Montparnasse pour devenir un as.
Voyage en première classe, quelle classe !
Prends la première place et surtout ne perds pas ton passe.

Et la gare d’Austerlitz, alors ? C’est la fin du voyage, tu en as fait du sport !
Comme Napoléon 1er, tu as oublié la mort et tu as battu tous les records.
Tout ça sans même aller à l’aéroport.

Il y a de l’électricité dans l’air

Il y a de l’électricité dans l’air, je le sens avec mon flair.
Gonflée d’électricité, la caténaire ne manque pas d’air.
Ses fils magiques sont suspendus en l’air.
L’électricité, telle une bonne fée, permet au train d’avancer en toute sécurité.
Comme un jaguar, le train file dans le noir
A toute allure, dans la nature pure et dure.

Il y a de l’électricité dans l’air, mon frère.
Attention aux Ampères, voyage en enfer :
C’est la révolte des mille volts.
Santé en danger, cerveau éclaté, neurones grillés : tu pars en fumée.
L’électricité, telle une mégère, nous envoie en l’air, loin de notre terre.
C’est un danger qui peut t’électrocuter ou t’assassiner.

Mon frère, surtout écoute ton père
Qui te crie : éloigne-toi de la caténaire,
Attends le 14 juillet, si tu aimes les feux d’artifice,
Au lieu de jouer ; tu resteras en vie, mon fils.
On n’a qu’une vie, elle est fragile, fais attention
C’est une morale facile avec du style et de l’émotion.

Le train-poubelle

Tous les matins, je prends le train-poubelle.
Le ciel est rempli de soleil. Mais le matériel, c’est pas du miel.
Sur les vitres, je voudrais me voir autrement qu’en noir.
Les vitres sont rayées, taguées, grisées.
Sur les sièges déchirés, il y a de la neige.
Je m’enfonce c’est un piège : il faut que je me protège.
Dans les couloirs, je marche à travers un brouillard.
Je vois un dépotoir de mouchoirs.
Les gens sont serrés nez à nez, comme des trophées usés.
On dirait une bataille rangée entre deux grandes armées.
Le train poubelle me cause bien du chagrin.
Je rêve de construire le train citoyen de demain de mes mains.

Les couleurs ne seraient plus des rumeurs.
Sur les vitres du bonheur, je verrais mon cœur en fleur.
Sur les sièges, je broderais des arcs-en-ciel et la neige fondrait au soleil.
Les couloirs scintilleraient comme des chemins aux mille miroirs.
Les gens, clairs et colorés, joyeux et gais,
Pourraient se déplacer en toute tranquillité.
Le train-citoyen deviendrait l’ami des humains.
Une foule de gamins y monterait chaque matin.
Le Transilien serait le meilleur des transports en commun.
Ce train vous appartiendrait comme il m’appartient.
Alors, s’il vous plaît, prenez-en soin.


Pour en savoir plus sur le Grand slam voir sur ce site l’article sur le Grand slam national de poésie