Lettre ouverte aux parents.
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Suite à la condamnation de notre collègue, voici une proposition de lettre ouverte à destination des parents par l’équipe pédagogique de l’école Jean-Jacques Rousseau 2.
Madame, Monsieur,
Un instituteur de la ville est actuellement poursuivi en justice suite au décès accidentel d’une de ses élèves en 1997. L’enquête a révélé que lorsque le drame s’est produit, l’enseignant était dans la classe et qu’en aucune manière il n’avait laissé s’installer une situation dangereuse pour les enfants.
Or, malgré ce constat, cet enseignant est aujourd’hui considéré comme coupable de la mort de la fillette.
Sachez-le ; tous les jours, en France, des milliers d’élèves manipulent des compas, des ciseaux, sont appelés à se déplacer dans les classes, dans les couloirs, dans les cours de récréation ou à l’extérieur de l’école. Certains partent en classe de découverte, au ski, à la mer, d’autres vont toutes les semaines à la piscine, ... Il serait impossible de dresser une liste exhaustive de toutes ces activités.
Et pourtant, chacune de ces situations, banales et quotidiennes, ou parfois plus exceptionnelles, représentent un risque potentiel pour les enfants. Chaque enseignant, dans toutes les classes, est conscient de sa responsabilité envers les enfants qui lui sont confiés et assume au mieux ses prérogatives.
Cependant, même avec la plus grande vigilance, il est impossible de prétendre maîtriser tous les risques liés à la seule présence de 25 enfants dans une classe. Tout est fait pour que le risque soit au niveau le plus bas, mais ce risque ne disparaît jamais complètement.
On peut alors imaginer que les enseignants décident désormais de s’offrir un luxe de mesures préventives : plus de sorties pédagogiques, sportives ou ludiques, plus de classes transplantées, plus de géométrie ou d’arts plastiques, ...
Pour excessives qu’elles puissent apparaître, ces mesures commencent pourtant à être envisagées dans les écoles et seront peut-être monnaie courante demain. Mais peut-on blâmer des enseignants de ne pas vouloir se retrouver devant un tribunal suite à un accident survenu dans leur classe ?
Comment pouvons-nous espérer voir nos enfants évoluer, prendre de l’assurance, gagner en autonomie si l’environnement que nous leur offrons ne laisse pas la moindre place au risque ? Car la prise de risque, comme l’erreur, sont les moteurs de l’évolution de l’enfant. Du bébé faisant son premier pas au premier saut dans le grand bain, les enfants prennent continuellement des risques. Leur interdire, c’est les empêcher de grandir.
Ne serait-il pas paradoxal que l’école devienne alors le lieu qui empêche les enfants de grandir ?
On ne peut tolérer cela, comme on ne peut tolérer qu’un enseignant, à jamais marqué par la perte de l’un de ses élèves, se retrouve condamné s’il est établi qu’il n’a pas, de façon consciente ou non, laissé s’établir une situation dangereuse pour ses élèves.
Les enseignants ne réclament pas l’impunité, mais que l’on prenne en compte le fait que dans les classes, comme partout ailleurs (et pourtant moins qu’ailleurs, Cf. rapport EHLASS [1]), les risques existent.
L’équipe pédagogique de l’école J.J. Rousseau II, Epinay S/Seine
[1] Le rapport EHLASS de 1992 indique que pour les moins de 1 an, 75% des accidents ont lieu dans la maison. Pour les accidents des enfants de 1 à 4 ans, près de 60% surviennent à la maison et 10% à l’école. Pour les 5 à 14 ans, près d’un accident sur 4 (25%) a lieu à l’école et 1 sur 5 sur des aires de sports
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